mercredi 11 mai 2011

Survivre d’arabe et d’eau fraîche !

Lait pour enfants
Un lot bloqué au port d’Alger

« Une quarantaine d’enfants atteints de phénylcétonurie, une maladie génétique grave, risquent une détérioration de leur état de santé en raison du manque de leur aliment essentiel, à savoir le lait sans
phénylalanine XP Maxa Med  (1er et 2e âges). »
In El-Watan édition du mercredi 27-04-2011.

Lait pour nourrissons bloqué au port d’Alger
Le ministère du Commerce inflexible

« Le produit (1500 boîtes) est bloqué depuis février dernier au port d’Alger en raison de l’absence de notice en langue arabe. La vie d’une quarantaine d’enfants atteints de phénylcétonurie est mise en danger. »
In El-Watan édition du mardi 10-05-2011.


Ces deux articles publiés à près de 15 jours d’intervalle par un grand quotidien national, traitent, d’une manière très détaillée d’un petit problème bureaucratique de routine que la plupart des importateurs des produits destinés à la grande consommation, rencontrent auprès des services de la DCP (Direction du Contrôle des Prix) en charge, entre autres, de faire respecter les règlementations relatives à la vulgarisation des informations inscrites sur les produits importés, auprès du consommateur lambda. Rien de plus normal en fait.

Dans ce sillage, un des règlements les plus contraignants, impose une obligation d’étiquetage en langue arabe de la totalité des produits entrant sur le territoire Algérien et destinés à la consommation (alimentaire ou non), permettant ainsi à tous les citoyens de pouvoir librement, consulter la composition, la date limite de consommation ainsi que les coordonnées et identités de l’importateur, dans une langue accessible au plus grand nombre.

Maintenant, et comme toujours, revenons à la réalité du terrain !

40 nourrissons Algériens atteints de phénylcétonurie, maladie neurologique dégénérative grave et qui, curieusement est inscrite sur les carnets de santé des nouveaux nés à une case qui dans 120% des cas, demeure vierge, révélant une absence quasi-totale de toute démarche de dépistage, sont actuellement en phase de se transformer en véritables légumes, suite à une petite « guéguerre des boutons » entre les services de deux des ministères les plus détestés ces derniers jours. J’ai nommé : les ministères de la santé et du commerce.

Non contents d’avoir transformé nos hôpitaux en catacombes, pour le premier et d’avoir livré le pays aux mains des « barons de l’informel » pour le second, ne voilà-il pas que nos zélés protecteurs des lois de la république, se jouent toute honte bue, de la survie et de la santé mentale de 40 de nos jeunes concitoyens et ce, depuis le mois de février passé !

En fait, ce lait que l’enfant doit impérativement prendre jusqu'à l’âge de 8 ans, avec une fréquence de 4 boites/mois, coûte actuellement 10.000 DA (95€) la boite ! Il est distribué gratuitement par l’association caritative Inner Wheel qui le fait importer par un laboratoire Algérien, sans aucune marge commerciale. Toute cette chaine de bonté et de solidarité est aujourd’hui freinée, voire stoppée par des bureaucrates imbéciles de deux des ministères dont l’utilité pour la société Algérienne reste encore à démontrer.

Le meilleur dans tout cela, c’est que le laboratoire Vapropharm (importateur bénévole du lait) a procédé au règlement de l’amende relative à cette « gravissime infraction » qui prive les pauvres parents de ces bébés de saisir ces boites, importés spécialement pour eux, et de s’offrir un quart d’heure de pratique littéraire jouissive dans une langue qui, reconnaissons-le, est d’une beauté prosaïque inouïe. Il est en effet, capital pour ces parents de savoir que cette mesure est destiné à les protéger eux et leurs enfants et permettre ainsi une émancipation du consommateur Algérien, même si pour cela, il faudra probablement se résoudre à ne plus voir ces pauvres enfants lire quoi que ce soit à l’avenir suite à la bêtise de pseudo responsables qui, j’en suis sûr, en ont vu passer d’autres. Ou carrément, en ont FAIT passer d’autres !  

Par ailleurs, l’on apprend que, suite à une correspondance adressée au ministère de la santé à laquelle ce dernier avait répondu en date du 11-04-2011 (1 mois déjà !!!), le secrétaire général du ministère de la santé avait saisi son homologue du ministère du commerce afin, je le cite « de le sensibiliser à la situation d’urgence que vivent les nourrissons atteints de phénylcétonurie et lui demander d’intervenir auprès de ses services,  à savoir la DCP, à l’effet de permettre la sortie au niveau portuaire du lait spécial susvisé en objet».

Traduisez comme ceci : « Je n’en ai pas glandé une ! ».

Alors, Messieurs les Ministres, pouvez-vous nous expliquer ceci :

-          Comment se fait-il que ces nourrissons ne soient pas pris en charge par l’Etat ?
-          Pourquoi ce produit est-il soumis à des redevances douanières de 30%+17% (TVA !!) tel une vulgaire boite de sardines ?
-          Pourquoi les importations de ce lait ne profitent-elles pas de canaux de dédouanement prioritaires ? Un peu comme ceux empruntés par les bombes lacrymogènes par exemple. (A noter pour autant que ces dernières ne contiennent pas d’étiquettes en arabe ! Mais tout à fait à votre décharge, leur usage ne requiert pas de grandes compétences !).
-          Quelle conception avez-vous de vos devoirs envers la société Algérienne ?

Aux dernières nouvelles, un second refus de délivrance du visa de contrôle qualité fut signifié en date du 19 avril 2011 pour les motifs suivants : «l’absence d’une notice de mode d’emploi en langue arabe constitue une infraction aux dispositions de la loi 09-03 du 25 février 2009 relative à la protection du consommateur et la répression des fraudes». Et le laboratoire Vapropharm va être obligé de réexporter le lait !

Ainsi, à cause de l’absence d’une p… de notice en langue arabe, dont l’utilisateur n’en a rien à foutre, l’Algérie se détourne de la prise en charge d’une minorité. Et c’est justement dans la prise en charge de ces catégories de citoyens que se dessinent les contours de la démocratie, de la bonne gouvernance et la grandeur d’une Nation.

L’application d’une loi peut-elle à ce point être aveugle et se détourner de la détresse d’autrui ? L’arabisation somme toute formelle et dénuée de sens dans ce cas, ne prend-elle pas en considération les appels de citoyens de l’identité desquels elle est censé faire partie ?
  
Cette belle langue est donc érigée en symbole répressif mais en fait cela ne fait que rajouter à la longue liste des extrémismes de tous genres dont souffre notre pays. Eh bien, Messieurs, au nom de ma citoyenneté Algérienne et de mon DEVOIR DE REFUS, je suis fier de ne pas être arabe.   

Mouloud BLIDI

Administrateur du Groupe Facebook : MARRE DU BARRAGE DE REGHAIA !! (ALGERIE)

2 commentaires:

  1. J'aurais été incapable de mieux hurler la colère et le mépris que provoquent en moi nos institutions inconstitutionnelles.
    Merci Mouloud

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  2. Merci Mouloud d'osé dénoncer un tel scandale

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